Covid-19 : une situation carcérale extrêmement préoccupante
En janvier 2020, les autorités françaises exprimaient une vigilance face aux alertes émises par l'oms, sans que de véritables mesures d'endiguement de la progression de l'épidémie ne soient prises.
Parmi les mauvais élèves, l'administration pénitentiaire, observant début mars les mutineries dans les centres pénitentiaires du nord de l'Italie, n'a que trop tardivement réagi face aux risques élevés d'épidémie au sein de ses établissements.
Inutile de préciser que la promiscuité, la surpopulation, la saleté liée aux conditions de détention vétustes de certains établissements font craindre le pire.
Malgré les risques évidents d'atteintes à la santé des personnels et des personnes détenues, l'administration pénitentiaire a publié une première note le 27 février 2020 suite à la déclaration le 25 février de l'ouverture du stade 1 en lien avec le décès d'un enseignant dans l'Oise.
Deux notes administratives ont accompagné le passage aux stades 2 et 3.
Une quatrième note publiée le 15 mars 2020 vient enfin renforcer les mesures de protection. Ce texte administratif était d'autant plus attendu que les mesures générales définies par le gouvernement ne peuvent répondre aux particularités du contexte pénitentiaire.
Ainsi, la note s'intitule « mesures renforcées pour assurer la continuité du stade 3 de l'épidémie de Covid-19 ».
La sécurisation des locaux et le maintien de l'ordre interne restent naturellement la priorité. Énumérant les missions essentielles liées à la gestion de la détention, l'administration laisse aux directeurs des services pénitentiaires le soin de les organiser en fonction des moyens disponibles en des termes assez larges « identifier avec les services et les partenaires les moyens humains pour assurer les missions essentielles ». L'intervention du spip dans le quartier arrivant est maintenu mais fait l'objet d'une adaptation définie par le chef de service.
Le second axe est la limitation des mouvements en actant la suspension des activités en espace confiné sauf pour les mineurs. Les promenades et les activités sportives sont accessibles à de petits groupes de détenus. Le travail et la formation sont maintenus à la condition que les gestes et les mesures barrières soient adoptés.
Les parloirs sont maintenus (sauf pour les personnes mineurs, âgées de plus de 70 ans ou les femmes enceintes), mais limités. L'administration pénitentiaire fait preuve de précaution en ce qui concerne la restriction de l'exercice d'un droit fondamental, en « invitant les détenus à reporter leurs visites ». La décision de confinement général prise par le Président de la République a conduit la Garde des sceaux à prendre la décision de suspendre tous les parloirs pour une durée de 15 jours à partir du mardi 17 mars.
Les transferts administratifs de détenus sont suspendus.
La note expose les recommandations en matière de suivi des personnes sous écrou dans le cadre du milieu ouvert, qui s'inscrivent dans les dispositions de la circulaire du 14 mars 2020 relative à l'adaptation des juridictions face au Covid-19.
Enfin, la dernière partie de la note concerne la gestion des ressources humaines et décrit les mesures à prendre concernant un membre du personnel absent ou isolé. Les chefs de service doivent également identifier les personnes vulnérables parmi les membres du personnel.
Cependant, pour les agents en activité, les services de restauration restent ouverts, nonobstant quelques aménagements.
La lecture de cette note confirme la prise au sérieux de la gravité de la situation sanitaire, mais semble proposer des mesures insatisfaisantes pour limiter la propagation du virus au sein de la détention. D'autres services publics ont adopté le même type de précautions, sans freiner pour tant la circulation du virus. Des mesures drastiques telles que le suivi en milieu ouvert, le placement sous surveillance électronique, la libération et le placement sous contrôle judiciaire des personnes détenues non dangereuses auraient été appropriés pour produire une protection réellement efficace.
Article très intéressant !
En ce temps de crise sanitaire mêlée d’hystérie et d’informations partielles, cet article est bienvenu par le hiatus décrit entre protection garante des droits et son contraire en milieu fermé et pénitentiaire. Merci pour ça.
Merci David 🙂